Flèche du temps : entre science, illusion et paradoxe

Flèche du temps : entre science, illusion et paradoxe

Pourquoi le temps s’écoule-t-il dans un seul sens ? Est-ce une réalité physique ou une illusion liée à notre perception ? À travers un duel entre réalistes, positivistes et tenants de la symétrie temporelle, l’ingénieur Bernard Chavondier nous embarque dans une conférence aussi brillante qu’accessible sur le mystère du temps. Un voyage scientifique, philosophique… et profondément humain.

Vidéo complète de la conférence :

Résumé : que raconte la conférence ?

Tout part d’une question simple en apparence : pourquoi le temps ne revient-il jamais en arrière ? Bernard Chavondier, ingénieur Arts et Métiers de la promo 1975, nous propose un exposé captivant, mêlant vulgarisation scientifique, expériences mentales, histoire des idées et sens de l’humour. Trois grands camps s’affrontent : les réalistes (Newton, Prigogine), les positivistes (Feynman, Bohr) et les symétriques (Aharonov, Rovelli), chacun proposant sa vision de la fameuse « flèche du temps ».

Le temps est-il une réalité objective ?

Pour les réalistes, la réponse est sans appel : oui. Le temps s’écoule de manière irréversible, indépendamment de tout observateur. Une pomme pourrit mais ne « dépourrit » jamais. Une goutte d’encre se dissout dans l’eau mais ne redevient jamais localisée. C’est l’entropie qui dicte cette asymétrie : les systèmes vont spontanément vers des états plus désordonnés. C’est la vision défendue par Boltzmann, Prigogine ou encore Rovelli.

« Nous ne sommes pas les parents de la flèche du temps. Nous en sommes les enfants. »

Ilya Prigogine

Et si l’irréversibilité n’était qu’une illusion ?

C’est le contre-argument du camp positiviste. Selon eux, à l’échelle microscopique, les lois de la physique sont réversibles. L’irréversibilité apparente serait une émergence thermodynamique, due à notre ignorance des milliards de variables microscopiques. Pour Feynman, si l’on pouvait inverser parfaitement les vitesses des molécules, l’encre pourrait « remonter le temps ».

« L’irréversibilité est une conséquence de la myopie de l’observateur macroscopique. »

Le positiviste (personnage de la conférence)

La physique quantique change-t-elle la donne ?

Oui, et de manière radicale. La mesure quantique est irréversible : une particule dans un état superposé se retrouve projetée dans un seul état observable. Impossible de revenir en arrière. C’est ici que le réaliste reprend la main… jusqu’à ce que la symétrie temporelle des équations quantiques vienne tout bousculer.

Des expériences modernes (Aharonov, Vaidman, et al.) montrent que, dans certaines conditions de pré- et post-sélection, les effets peuvent apparaître comme rétrocausaux. En d’autres termes, le futur pourrait influencer le passé. Vertige assuré.

Vers une réconciliation des points de vue ?

Bernard Chavondier conclut avec prudence, mais assume son camp : celui d’un réalisme tempéré, proche des idées de Carlo Rovelli. Selon lui, la flèche du temps émerge de notre perception limitée de l’univers. Si nous pouvions tout connaître, tout serait symétrique. Mais nous sommes des observateurs partiels, ignorants de l’infiniment petit… et c’est cette ignorance qui crée le temps.

« Si nous n’étions pas myopes, nous serions aveugles. »

Carlo Rovelli

Une conférence entre science, théâtre et métaphysique

Dans une mise en scène vivante et drôle, Chavondier joue les rôles de ses personnages (Newton, Feynman, Prigogine…), raconte, démontre, doute. Il s’adresse au public comme à un partenaire de réflexion. Et s’il est parfois débordé par la complexité du sujet, il le dit avec humour et humanité. Une grande leçon de science… et d’humilité.